
Des Crues Rapides et Violentes
La Loire amont et ses affluents sont depuis longtemps redoutés des hommes en raison de leur caprices et de leurs crues dévastatrices.
La crue des 21 et 22 septembre 1980 est dans tous les esprits des habitants des bords de la Loire et du Lignon du Velay, cet évènement a causé la mort de 7 personnes et plus de 500 millions de francs de dégâts.
Ponctuellement, certains affluents sont à l’origine de crues très violentes caractérisées comme des évènements torrentiels. La crue de la Suissesse du 24 mai 1996, qui a complétèrent ravagé les cours d’eau du bassin versant, en est un bon exemple et les stigmates de cette crue sont encore visibles aujourd’hui près de 25 ans plus tard.
Les récents épisodes sur la Loire et le Lignon le 17 octobre 2024, de Costaros le 13 juin 2017 et de Pont-Salomon le 6 août 2019 ainsi que les crues de la Sumène et de la Suissesse du 12 juin 2020 témoignent de la récurrence de ces phénomènes dont la fréquence et l’ampleur risquent de s’accroître dans la perspective du changement climatique.
Un Risque avéré
Sur le périmètre de l’EPAGE, 46 communes ont un PPRI approuvé (Plan de Prévention du Risque d’Inondation). Ces documents établis à l’échelle communale sont réglementaires et notamment les zonages qui y sont annexés. C’est un outil de planification territoriale pour la commune qui définit des règles de constructibilité pour les terrains susceptibles d’être inondés.
Une Compétence déléguée
La gestion du risque d’inondation est un domaine complexe à la croisée des politiques d’aménagement du territoire et de gestion durable des milieux naturels. Aujourd’hui, dans le cadre de la loi de Modernisation de l’Action Publique Territoriale et d’Affirmation des Métropoles, la compétence « prévention des inondations » a été créée et confiée à l’échelon intercommunal à compter du 1er janvier 2020.
Aussi lors de la construction de l’EPAGE Loire-Lignon, les intercommunalités adhérentes ont choisi de déléguer cette compétence au syndicat hormis la Communauté d’Agglomération du Puy-en-Velay (CAPEV). En effet, la CAPEV est classée en Territoire à Risques Importants d’inondation et a souhaité poursuivre elle-même l’élaboration de sa Stratégie Locale de Gestion du Risques d’Inondation (SLGRI).
Quels enjeux et quels aléas sur le territoire?
Une étude de réduction du risque d’inondation va être conduite en 2020-2021 sur une partie du territoire de l’EPAGE Loire-Lignon pour laquelle les EPCI lui ont délégué la compétence.
Cette étude a pour objectif d’identifier les secteurs présentant des risques d’inondation, d’actualiser les connaissances actuelles de ces secteurs et de proposer des aménagements et des modalités de gestion pour réduire le risque pour les habitants et les dommages aux biens et aux infrastructures.
Ainsi, l’étude doit s’intéresser aux différentes composantes du risque et analyser l’intérêt de :
- réduire l’aléa inondation, c’est-à-dire limiter la submersion et les vitesses d’écoulements des eaux,
- réduire les enjeux socio-économiques exposés,
- réduire la vulnérabilité des enjeux par rapport à l’aléa, c’est-à-dire rendre les conséquences de l’inondation plus supportables
Cette étude, confiée au bureau d’étude « Egis Eau », s’étalera sur deux ans et sera scinder en trois phases :
- phase 1, réaliser un état des lieux d’exposition au risque d’inondation ;
- phase 2, définir les caractéristiques hydrauliques des bassins versants et cartographier la vulnérabilité et le risque du territoire ;
- phase 3, proposer des solutions de réduction du risque.
Par ailleurs, une autre étude pilote, spécifique aux risques liés aux ravins et aux crues torrentielles, est lancée en parallèle sur le territoire de la Communauté de Communes Loire-Semène.

RETOUR SUR LA CRUE DU 17/10/2024
La crue du 17 octobre 2024 est la plus forte que nous ayons connue sur le Loire et le Lignon ces 40 dernières années et elle se rapproche fortement de la crue centennale de 1980. Le diagnostic post-crue est sans appel avec de nombreux dégâts. La communauté d’agglomération du Puy-en-Velay et la communauté de communes du Haut-Lignon ont été les plus touchées. Le Lignon a connu un pic de crue de 840 m³/s mesurés à Tence, au niveau de la levée Morin. La Loire a connu un pic de crue de 1340 m³/s à Chadrac et de 2340 m³/s à Bas-en-Basset (source : vigicrues.gouv.fr).
Pour le compte des collectivités compétentes, l’EPAGE a été missionné pour diagnostiquer et chiffrer les travaux post-crue pour ce qui concerne : les volumes d’embâcles et d’alluvions qui se sont déposés en berges et dans les prés ainsi que les principales anses d’érosion. Pour réaliser ce travail en moins d’un mois, pas moins de 8 techniciens de l’EPAGE ont été mobilisés. L’ensemble du personnel administratif a été mis à contribution pour établir les fiches des travaux d’urgence.
Au final, sur l’ensemble du territoire de l’EPAGE ce sont : 30 000 m³ d’embâcles, 5 500 m³ de sédiments et 2 300 m linéaire d’érosion qui ont été diagnostiqués et chiffrés. Suite à ce travail, le volume estimatif des travaux a été soumis aux devis des premières entreprises disponibles. Le montant des travaux s’élève à un peu plus de 3 millions d’euros sur l’ensemble du territoire de l’EPAGE et ce, sans compter les dégâts sur les ponts, les voiries ou les infrastructures publiques qui ont été estimés par les services communaux et le service ingénierie du département, Ingé43. Les entreprises mandatées sur les principaux linéaires impactés sont secondées par les équipes de l’EPAGE pendant plus de 2 mois, pour travailler sur les portions de cours d’eau les moins accessibles.



Concernant les chantiers de remise en état, il est préconisé, dans la mesure du possible, de reculer les aménagements et les infrastructures pour redonner un espace de liberté à la rivière, de ré-ouvrir les sections hydrauliques et limiter les risques de nouveaux dégâts (enrochement, protection des berges, etc.). Mais également, toujours dans la mesure de la place disponible en largueur (au moins 2 à 3 horizontaux pour 1 vertical), de remplacer les enrochements par des aménagements en génie végétal qui ont, dans l’ensemble, bien mieux résisté à la crue. Et en matière d’ouvrages (franchissement, passage busé, pont, etc), de même, il est conseiller plutôt de surdimensionner les passages d’eau, en laissant libre le fond du lit des cours d’eau, plutôt que de les réimplanter à l’identique.
Sur un plan environnemental, même si visuellement l’ampleur des dégâts et leurs impacts sur le paysage peuvent faire mal au coeur, il faut se rappeler que les crues sont des phénomènes naturels. Ces bouleversements hydrauliques récurrents modifient la sinuosité et le profil en long des cours d’eau. Ces phénomènes d’érosions latérales et d’incisions, contribuent au rajeunissement de la végétation des berges, à la recharge et au rééquilibrage de la dynamique sédimentaire ainsi qu’au décolmatage du fond du lit de la rivière. La crue contribue au rajeunissement des cours d’eau, à les dépolluer, à les nettoyer, l’eau et le fond redeviennent propres. Elle favorise, les frayères à truites, le retour de certaines espèces pionnières, végétales ou animales, qui recolonisent les rives : comme le martin pêcheur qui creuse son nid dans les fronts d’érosion de la berge ; le Chevalier Guignette ou encore les Crapauds Accoucheurs ou Calamites qui affectionnent les grèves de sables et de galets.

A contrario on observe beaucoup d’embâcles et d’arbres arrachés. La ripisylve et les nombreux rôles écologiques qu’elle remplit ont dû en prendre un coup (corridor, habitat, nourritures, ombrage, maintien des berges, zone tampon, auto-épuration, etc.) ? Ne dit-on pas pourtant qu’il n’y a pas de cours d’eau en bon état sans ripisylve en bon état ? Mais au final, combien d’arbres sont partis ? Visiblement beaucoup ? Mais en moyenne sur l’axe Lignon, moins de 5 % … Et pour ceux qui sont partis, il faut rappeler que la ripisylve n’est pas seulement un alignement d’arbres aux bords des rivières. C’est un boisement qui doit avoir une certaine consistance et une certaine densité en largueur pour pouvoir se maintenir.
Souvent après une crue, on constate une explosion de la vie aquatique et déjà on observe des larves d’éphémères ou de plécoptères, des truites, des goujons, des vairons et même des alevins ! Comme quoi la crue n’a pas tout cassé, n’a pas tout tué. Dès ce printemps, avec la reprise de la végétation beaucoup de stigmates se seront stigmates se seront effacés et il est fort à parier que d’ici un an ou deux, au niveau de la vie aquatique ce sera comme s’il ne s’était rien passé.